PASS SANITAIRE COVID principales dispositions

PASS SANITAIRE COVID principales dispositions

Par la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 dite de « sortie de l’Etat d’urgence », le législateur a instauré le passe sanitaire. Pour rappel, le « pass sanitaire » consiste à la présentation numérique (via l’application TousAntiCovid) ou papier, d’une preuve sanitaire, parmi les trois suivantes :

  • La vaccination, à la condition que les personnes disposent d’un schéma vaccinal complet et du délai nécessaire après l’injection finale.
  • La preuve d’un test négatif de moins de 48h pour le « pass sanitaire activités » pour l’accès aux grands événements concernés et maximum 72h pour le contrôle sanitaire « voyages ».
  • Le résultat d’un test RT-PCR positif attestant du rétablissement de la Covid-19, datant d’au moins 11 jours et de moins de 6 mois.

Ce dispositif s’imposait alors pour les voyageurs en provenance ou à destination de la France continentale, de la Corse ou des outre-mer et pour accéder à de grands rassemblements de personnes pour des activités de loisirs et des foires et salons.

Saisi, le Conseil constitutionnel avait alors exprimé qu’en réservant l’application du passe sanitaire aux cas de grands rassemblements de personnes, le législateur n’avait ainsi pas méconnu l’étendue de sa compétence. (Décision du Conseil constitutionnel n° 2021-819 du 31 mai 2021).

Le décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de la crise sanitaire modifié par le décret n° 2021-724 du 7 juin 2021, fixait en ce sens une jauge de 1 000 personnes pour ces grands rassemblements (concerts, spectacles, festivals, manifestations sportives, conférences…) à partir du 9 juin.

Selon les termes du Conseil d’Etat alors saisi par une procédure en référé suspension, le décret n’est pas manifestement illégal dans la mesure où son usage a été restreint aux déplacements avec l’étranger, la Corse et l’outre-mer, d’une part, et à l’accès à des lieux de loisirs, d’autre part, sans que soient concernées les activités quotidiennes ou l’exercice des libertés de culte, de réunion ou de manifestation.  (Conseil d’Etat, n° 453505, 6 juillet 2021)

Tel était l’état du droit : le passe sanitaire était alors réservé aux cas de grands rassemblements et son usage était restreint à l’accès à des lieux de loisirs sans que soient concernées les activités quotidiennes des Français.

 

Pourtant, depuis le début de l’été, nous assistons à trois extensions du dispositif intitulé « passe sanitaire » :

1/ La première extension a été opérée par le décret n° 2021-910 du 8 juillet 2021, et a d’abord concerné les discothèques et les salles de danse de 50 personnes.

2/ La deuxième extension est en oeuvre depuis le 21 juillet 2021 et a été opérée par un décret n°2021-955 du 19 juillet de la même année. Ce texte règlementaire abaisse à 50 personnes le seuil d’application du passe sanitaire et complète la liste des lieux concernés ( salles de cinémas, salles de théâtre, musées…) 

Il convient de relever ici que ce  nouveau décret du 19 juillet 2021 vient modifier le décret du 1er juin susvisé qui lui-même met en application la loi du 31 mai 2021 sur la sortie de crise sanitaire. Le décret du 19 juillet est donc en réalité un décret d’application de la loi du 31 mai  2021 dite de « sortie de l’Etat d’urgence ». Un décret pouvant d’ailleurs être modifié par un autre décret très facilement tant qu’il est en accord avec la loi qui le met en application.

Pourtant, nous rappelons que la loi du 31 mai 2021 avait été jugée conforme à la constitution dans la mesure où le passe sanitaire était réservé aux cas de grands rassemblements.

Face à cette réserve, le Conseil d’Etat a alors été saisi d’une procédure en référé suspension et d’un référé liberté à l’encontre du décret du 19 juillet suscité qui élargit l’utilisation du passe sanitaire.

Dans une première décision, le Conseil d’Etat, expose alors qu’ : « En raison de ces circonstances de reprise épidémique forte, qui permettaient au Premier ministre de prendre sans attendre les mesures contestées, le moyen tiré de l’illégalité de la fixation à 50 personnes de la taille des rassemblements nécessitant un passe sanitaire n’est pas de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité du décret contesté » (Conseil d’Etat, n° 454792, 454818 du 26 juillet 2021).

Dans une seconde décision, le Conseil d’Etat juge que le décret n’est pas de nature à porter une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées, la liberté d’expression et la libre communication des idées, la liberté de création artistique, la liberté d’accès aux œuvres culturelles, la liberté d’entreprendre et la liberté du commerce et de l’industrie ainsi que le droit au libre exercice d’une profession (Conseil d’Etat, n° 454754, 26 juillet 2021).

La reprise de l’épidémie liée à la diffusion du variant Delta pouvait en effet justifier l’élargissement de l’utilisation du passe sanitaire ainsi que l’entrée en vigueur immédiate de cette mesure. Par ailleurs, la future loi relative à la gestion de la crise sanitaire devrait rendre prochainement caduc le décret contesté, qui ne sera donc encore en vigueur que pour quelques jours. 

Tel est donc l’Etat de Droit : l’extension du passe sanitaire s’impose alors même que le texte législatif encadrant cette mesure n’a pas encore été promulguée ni même votée à la date de son entrée en vigueur !

Autrement dit, le décret du 19 juillet 2021 n’est pas manifestement illégal car l’extension du passe sanitaire sera couverte dès que le projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire sera promulguée….dans les prochains jours.

3/ Et c’est donc là, la troisième étape de l’extension du passe sanitaire : La loi sur la gestion de crise que le gouvernement présente sur son site internet comme acquise dès le 12 juillet dernier, avant même le dépôt du projet de loi devant le parlement.

 

LA SITUATION A COMPTER DU 21 JUILLET 2021

A la suite de la publication du décret n° 2021-955 du 19 juillet 2021, et depuis le 21 juillet, la présentation d’un  passe sanitaire est obligatoire pour les personnes qui souhaitent accéder aux activités culturelles, sportives, ludiques et festives ainsi qu’aux foires ou salons professionnels, qui accueillent au moins 50 personnes et qui se déroulent :

–> dans les établissements recevant du public (ERP) suivants :

  • ERP de type L : salles d’auditions, de conférences, salles de spectacles et concerts, cinémas, salles des fêtes et polyvalentes ;
  • ERP de type CTS : chapiteaux, tentes et structures ;
  • ERP de type P (à l’exception des discothèques pour lesquelles le passe sanitaire s’applique dès le premier client) : salles de jeux et salles de danse, ainsi que les restaurants et débits de boisson pour les activités de danse qu’ils sont autorisés à proposer ;
  • ERP de type T : établissements à vocation commerciale destinés à des expositions, des foires-expositions ou des salons ayant un caractère temporaire ;
  • ERP de type PA : établissements de plein air tels que les stades, piscines et équipements sportifs de plein air, parcs de loisirs et d’attraction et parcs à thèmes ;
  • ERP de type X : gymnases, piscines et équipements sportifs couverts ;
  • ERP de type V : lieux de culte pour les activités ne présentant pas de caractère cultuel (ex : concerts et expositions dans les édifices religieux) ;
  • ERP de type Y : musées et salles d’expositions temporaires ;
  • ERP de type S : bibliothèques et centres de documentation, sauf les bibliothèques universitaires et spécialisées et des personnes accédant à ces établissements pour des motifs professionnels ou de recherche ;
  • ERP de type R : établissements d’enseignement artistique, de danse, du spectacle vivant uniquement pour l’accueil du public extérieur.

–> Le passe sanitaire s’applique également pour les personnes majeures :

 Aux navires et bateaux de croisières à partir de 50 passagers ;

 Aux fêtes foraines comptant plus de 30 stands ou attractions ;

 Aux compétitions et manifestations sportives soumises à autorisation ou déclaration préalable rassemblant au moins 50 participants par épreuve, à l’exception des compétitions et manifestations organisées au bénéfice des sportifs professionnels ou de haut niveau.

 –> Le passe sanitaire s’applique également  sur la voie publique ou dans des lieux ouverts au public et susceptibles de donner lieu à un contrôle d’accès des personnes.

 Concrètement, le passe sanitaire n’est donc pas obligatoire pour les évènements se déroulant sur l’espace public et qui, par nature, ne peuvent donner lieu à aucun contrôle d’accès du public, notamment :

– les feux d’artifices,

– les défilés et fanfares sur la voie publique, les processions,

– marchés, foires, brocantes et vide-greniers.

En revanche, le passe sanitaire doit être mis en place pour l’accès des personnes majeures aux animations rassemblant au moins 50 personnes lorsqu’un contrôle d’accès peut être mis en place, soit par barriérage sur la voie publique, soit aux points d’accès des lieux ouverts au public dans lesquels ils se déroulent (ex : jardins publics, parkings et cours d’établissements, terrains privés ouverts au public).

Cette règle concerne notamment les animations suivantes :

 les bals et repas dansants,

 les concours de pétanque, ainsi que les animations sportives et ludiques,

 les concerts et spectacles.

A noter que pour les buvettes et petite restauration, il doit être appliqué le protocole sanitaire déjà en vigueur pour le secteur hôtellerie – cafés – restaurant. Elles seront concernées par l’application du passe sanitaire dès le premier client dans le même temps que les bars et restaurants.

 

LA SITUATION A COMPTER DE LA PROCHAINE PROMULGATION DE LA LOI RELATIVE A LA GESTION DE LA CRISE SANITAIRE

Ce projet procède à une extension encore plus conséquente du passe sanitaire prévue, selon les annonces présidentielles, dès la 1ère personne pour l’accès aux « cafés,  restaurants, centres commerciaux, ainsi que dans les hôpitaux, maisons de retraites, les établissements médicosociaux mais aussi dans les avions, trains et cars pour les longs trajets » des « clients, usagers ou salariés ».

A date, et tel qu’adopté par les députés le 25 juillet 2021 (par 156 voix pour, 60 contre et 14 abstentions) le passe sanitaire, instauré par la loi du 31 mai 2021 jusqu’au 30 septembre 2021 est  prolongé jusqu’au 15 novembre 2021. 

Son périmètre est en effet étendu à de nombreuses activités de la vie quotidienne :

  • les bars et restaurants (à l’exception des restaurants d’entreprise), y compris en terrasse ;
  • les séminaires ;
  • les transports publics (trains, bus, avions) pour les trajets longs ;
  • les hôpitaux, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et les maisons de retraite pour les accompagnants, les visiteurs et les malades accueillis pour des soins programmés. Le passe ne sera pas demandé en cas d’urgence médicale.

S’agissant des grands magasins et centres commerciaux, le législateur n’exige pas le passe sanitaire…mais délègue cette compétence à chaque préfet du département qui pourra imposer la mesure en fonction de la situation épidémique locale.

Le passe sera exigible :

  • pourle public (personnes majeures) dans tous ces lieux et établissements dès l’entrée en vigueur de la loi. A noter qu’un délai supplémentaire a été accordé aux enfants de 12 à 17 ans, pour qui le passe ne sera obligatoire qu’à partir du 30 septembre 2021.
  • pour les personnels qui y travaillent à partir du 30 août 2021. À défaut de présenter ce passe, leur contrat de travail pourra être suspendu, sans salaire. Une affectation sur un autre poste, sans contact avec le public, pourra leur être proposée. Toutefois, les contrats de travail à durée déterminée (CDD) pourront être rompus par les employeurs.

Reste que le projet de loi relative à la gestion de crise sanitaire doit encore être validé par le conseil constitutionnel qui a déjà été saisi et qui doit se prononcer le 5 août prochain.

En effet, cette extension n’est pas sans poser de nouveaux problèmes juridiques…Comme le fait que les préfets puissent eux-mêmes mettre en place le passe sanitaire à l’entrée des « grands centres commerciaux, si les conditions l’exigent, en garantissant l’accès aux services essentiels »

Or, comme le relève le Professeur Dominique ROUSSEAU, l’article 34 de la constitution dispose qu’il appartient au législateur de fixer des règles concernant les activités qui peuvent porter atteinte aux libertés. Le projet de loi opère donc une délégation possible aux préfets qui auront la charge de décider eux mêmes des restrictions d’accès pour tel ou tel centre commercial. Nous assistons là, à un abandon par le législateur de sa compétence au profit de l’autorité administrative.

 

QUEL CONTRÔLE ET QUELLES SANCTIONS ENCOURUES ?

Pour contrôler le passe sanitaire, une application destinée aux professionnels a été lancée. Ces derniers seront uniquement responsables du contrôle du passe sanitaire.

Seules les forces de l’ordre pourront vérifier, via des contrôles aléatoires ou alertes, l’identité du porteur du passe. A noter que le fait de porter celui d’autrui est érigé en infraction. Les parlementaires ont prévu des sanctions pour utilisation frauduleuse d’un pass sanitaire (135 euros d’amende et plus en cas de récidive) et des circonstances aggravantes en cas de violences commises sur les personnels chargés de vérifier le passe.

Des sanctions sont encourues en cas de non-présentation par le public du passe. Il s’agit d’une amende de 135 euros. A défaut de paiement ou d’une requête présentée dans le délai de 45 jours, celle-ci est majorée de plein droit à 375 euros.

Le projet de loi relatif à l’extension du passe sanitaire prévoit que le contrôle des exploitants notamment soit effectué par les forces de l’ordre.

L’absence de contrôle par l’exploitant d’un lieu ou établissement et par les professionnels chargés de le vérifier entraine une mise en demeure par l’autorité administrative de se conformer à cette obligation, sauf en cas d’urgence ou d’évènement ponctuel.

Cette mise en demeure indique les manquements constatés et fixe un délai, au plus de 24 heures ouvrées à l’expiration duquel l’exploitant ou professionnel doit s’y conformer.

Dans l’hypothèse où la mise en demeure est infructueuse, l’autorité administrative peut ordonner la fermeture  administrative du lieu, établissement ou évènement en question pour une durée maximale de 7 jours.

Cette fermeture temporaire de l’établissement peut être levée avant si l’exploitant du lieu ou établissement ou le professionnel responsable de l’évènement apporte la preuve de la mise en place des dispositions lui permettant de se conformer à son obligation.

Si une telle violation est verbalisée à plus de trois reprises dans un délai de trente jours, les faits sont punis d’un an d’emprisonnement et de 9 000 euros d’amende.

 

Stéphanie DUBITON avocate

Docteur en droit public

Cabinet TUMERELLE